Le 6 août 2024, l’Office des Brevets Chinois (CNIPA) a apporté la dernière touche, longtemps attendue, au système des « Patent Term Extensions » (PTE), proposé dans la Loi du 17 octobre 2020.
Cette Loi ouvre la possibilité de requérir une prolongation de la durée de protection de tout brevet couvrant sur un nouveau médicament bénéficiant d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) en Chine, sous réserve que certains critères soient satisfaits. Un système similaire existe déjà dans plusieurs territoires à travers le monde comme aux Etats-Unis (PTE) et en Europe (CCP) et vise à compenser, au moins en partie, le retard de commercialisation du médicament dû au délai nécessaire pour obtenir son AMM dans le pays. La durée de prolongation octroyée en Chine est au maximal de 5 ans ET de 14 ans après date d’octroi de l’AMM. Son calcul tient compte notamment de la date à laquelle l’AMM Chinoise est obtenue et de la date de dépôt du brevet.
Il a fallu attendre le 20 janvier 2024 pour que le règlement d’exécution précise le mode de calcul et les conditions de cette prolongation (« patent term extension » ou PTE).
Enfin, ce 6 août, l’Office des brevets Chinois a enfin précisé dans ses Directives le barème des taxes officielles, sans lequel l’examen des requêtes de PTE ne pouvait commencer.
Les titulaires des brevets qui ont déjà déposé leur requête en PTE, ont jusqu’au 26 octobre pour acquitter une modique taxe (200 RMB, environ 25 EUR). Les premières décisions de l’Office Chinois devraient donc arriver prochainement et apporter des éclaircissements sur les conditions d’obtention des PTE, notamment en ce qui concerne la notion de « brevets» et de « médicaments » éligibles.
Brevets éligibles à un PTE en Chine
Un brevet protégeant un médicament (qu’il s’agisse d’un brevet de produit, de procédé, ou d’indication thérapeutique), peut faire l’objet d’un PTE, sous réserve que l’AMM sur laquelle se fonde la demande de PTE concerne un médicament appartenant à une catégorie de nouveaux médicaments définis selon la loi chinoise et en accord avec l’Agence Chinoise du Médicament, la NMPA (National Medical Products Administration).
La notion de « nouveaux médicaments » se réfère non seulement à de « nouveaux principes actifs » (médicaments innovants) jamais autorisés en Chine, mais également à des « médicaments améliorés ». Le principe de « nouveauté » se rattache à un concept dit de « nouveauté globale », non limitée au seul territoire Chinois. Ce « concept de nouveauté globale » diffère du principe de « 1ère AMM » tel que défini dans la réglementation Européenne.
Ainsi, un médicament qui a déjà été autorisé à l’extérieur de la Chine, pour une indication particulière, ne sera pas considéré comme un « nouveau médicament » selon la loi chinoise, même si ce médicament n’a pas été autorisé auparavant en Chine pour cette indication.
En revanche, un brevet portant sur un médicament « amélioré » peut être éligible. Selon la liste fournie par la NMPA, un médicament amélioré engloberait un nouveau sel ou ester d’un actif connu (sous réserve d’avoir des effets cliniques améliorés), une nouvelle indication thérapeutique d’un actif connu, ou encore un médicament biologique amélioré, par exemple un vaccin contenant une souche vaccinale améliorée.
A contrario, un médicament basé sur une nouvelle combinaison d’actifs connus, une nouvelle formulation, un nouveau mode d’administration ou encore une nouvelle forme cristalline d’un actif connu se serait pas un « médicament amélioré éligible » pouvant servir de base à une demande de PTE en Chine.
Il est ainsi à retenir que, contrairement à la législation Européenne, une requête de PTE peut être basée sur une AMM ultérieure couvrant une nouvelle indication d’un principe actif déjà autorisé. En revanche, la portée de protection du PTE ainsi délivré sera limité à l’indication thérapeutique objet de l’AMM.
Un PTE peut être demandé sur la base de tout nouveau médicament innovant ou amélioré tel que défini par la NMPA, sous réserve que le critère de « nouveauté globale » soit respecté, c’est-à-dire que la demande d’AMM en Chine pour le médicament et l’indication soit déposée avant que toute autorisation correspondante soit accordée à l’étranger.
Conditions d’obtention d’un PTE en Chine
La requête de PTE doit être déposée dans les 3 mois de la date d’obtention de l’AMM en Chine et doit satisfaire les conditions suivantes : 1) la date de délivrance du brevet doit être antérieure à la date d’octroi de l’AMM en Chine, 2) le brevet doit être en vigueur (notamment non-expiré) , 3) le brevet ne doit pas avoir fait l’objet d’un PTE délivré et 4) le médicament doit tomber dans la portée du brevet.
La règle : un seul PTE pour un seul brevet. Un PTE ne sera donc octroyé que pour un brevet qui n’a pas déjà fait l’objet d’un PTE. Si un médicament est couvert par plusieurs brevets, le titulaire devra choisir sur quel brevet faire porter son PTE.
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Nous attendons maintenant les premières décisions qui viendront clarifier les conditions d’obtention des PTE en Chine, notamment en ce qui concerne la définition des nouveaux médicaments innovants et nouveaux médicaments améliorés éligibles.
Avec ces mesures, la Chine offre de nouveaux moyens pour renforcer la protection des médicaments, tout en cherchant à inciter les entreprises pharmaceutiques étrangères à déposer leur première demande d’AMM sur le territoire chinois. Reste voir si cette incitation compensera les difficultés réglementaires, et en séduira effectivement certains, attirés par la croissance du marché chinois des médicaments.